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Transeparence
27 octobre 2010

Illustration - Le fossé (II)

 

Sans doute, il était difficile de comprendre le dernier sujet sans connaître l’œuvre de R. Hobb. L’illustration qui vient a pour but de démontrer, cette fois sans les circonvolutions langagières de la théorie, les allusions conceptuelles et les explicitations, où le bât blesse.

L’exemple pris à une portée universelle – encore que, l’issue de cet article soulignera les limites de cette portée – et je veux croire qu’à la différence de R. Hobb, toute personne connaît P. Picasso. Déjà, remarquons que nous avons, comme dans toute culture, érigé des références ; Picasso en est une, incontestable dans le domaine de l’art contemporain.


                Le constat est alors simple et déconcertant. La culture est presque en libre accès – physiquement – les bibliothèques municipales sont gratuites, les droits d’entrée des musées nationaux sont loin d’être prohibitifs et, malgré l’effort national, l’élan impulsé par A. Malraux, nous en éprouvons l’essoufflement.

Il est de bon ton, surtout lorsqu’on prétend appartenir à la dominante classe moyenne, d’avoir une « culture », aussi stérile soit-elle. D’où la prolifération et la diffusion de cette manne des « manuels de culture-G », sortes d’ersatz fabuleux de ce que l’on érige comme le suprême du raffinement.

Demeure alors une sorte de quiproquo : il existe une culture obligatoire, de façade, sans laquelle on ne figure pas parmi les classes émancipées c'est-à-dire aptes à pratiquer le loisir de masse, distincte de la véritable culture ferment de la création. C’est donc sur la première, la culture illusoire, que butte l’élan philanthropique de la démocratisation, trop souvent raccourcie par l’autoroute de la vulgarisation : ainsi accélérée, la culture n’a plus d’Histoire, elle persiste seulement comme caution de classe.



                La domination culturelle a encore de beaux jours devant elle, malgré les efforts généreux, les utopies portées par l’idée d’égalitarisme. L’arriviste, le nouveau riche, l’accédant aux classes supérieures ne peut toujours pas se débarrasser de ses carences culturelles. Les anecdotes sont nombreuses et probantes. Voyez plutôt : une jeune fille, visiblement avide d’en découdre avec les concours de l’administration, qui plus est au rang A, lassa entrevoir, en fermant son ordinateur, le Guernica de Picasso, placé ici en fond d’écran. 

guernica

 

 

 

 

 

 

 

Au-delà du fait qu’il soit absurde de faire de ce tableau un fond d’écran : nous conviendrons que ce n’est pas un objet de consommation, mais une œuvre et pardessus tout, un acte militant, cette peinture a un effet dévastateur pour quiconque se prend à l’examiner. La violence d’un tel charnier ne peut qu’infliger un sentiment d’effroi à celui qui la regarde. Doit-on en conclure que cette jeune fille était animée d’un masochisme affiché ? La vérité est plutôt celle-ci : elle a simplement eu la prétention de faire croire qu’elle maîtrisait les grands noms de la peinture contemporaine, sans prêter attention au contresens, flagrant qu’elle faisait. Tel un singe savant, elle se pare de signifiant qu’elle ne comprend pas.

Le ridicule ne tue pas. En revanche, il révèle un fossé que la classe moyenne n’a pas réussi à combler malgré la colossale culture de masse. 

 Contrat Creative Commons
This création is licensed under a Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 2.0 France License.

 

 

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