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Transeparence

28 décembre 2010

Préserver l'Innocent au mépris des parents.

 

Selon la fondation Abbé Pierre, "600 000 enfants sont victimes de mal-logement" : cela est sûrement vrai et indéniablement regrettable. Mais pourquoi attirer l’attention spécialement sur les enfants ; s’ils sont si nombreux, on peut, sans peine, imaginer que les adultes qui les ont engendrés partagent aussi cette détresse. 

campagne_pub_fondation_abbe_pierre_manon 

La campagne présente seulement des enfants, au demeurant mignon, ce qui doit sans doute provoquer un surcroît de compassion. Dans notre société, la souffrance infantile est insupportable, qu’elle soit physique ou morale, souvent les deux, il faut épargner à l’enfance toutes les souillures de la misère, préserver notre conception selon laquelle l’âme de l’enfant est immaculée. Mais l’innocence enfantine est cruelle : elle se décharge sur la culpabilité des parents mal-logés qui portent, ajouté aux maux engendrés par un environnement malsain, la responsabilité de n’avoir rien à offrir d’autre à ceux qui leur doivent la vie.


La sacralisation de l’enfance est un motif récurrent, on parle avec naturel de « droit à l’enfance », on a débattu sur l’interdiction de la fessée ; en institutionnalisant la fragilité – réelle – de l’enfant, on transforme l’innocent en tyran que le lien familial nié a laissé s’échapper. Peut-être que les parents de Manon (parce qu’elle seule est représentée et porte un nom) souffrent encore davantage d’imposer ces conditions de vie, qui sont imputables à leur parcours. Pourtant, l’issue sera la DDASS pour préserver l’enfance de Manon et la soustraire à ses parents que l’on juge incapables de remplir leur devoir parental, sans doute ultime humiliation dans une vie où la dignité est déjà absorbée par la précarité. Punis les parents, Punis! 

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24 novembre 2010

Tea Parties Patriots & 50's

Pinup

Les libéraux et l’abondance standard ont presque réussi à nous faire oublier la réaction. Pourtant elle est devenue celle des masses en abandonnant les privilégiés, nantis des bourses mondiales, les nostalgiques passéistes. La réaction s’empare du peuple, des forces démocrates à commencer par celle emblématique de Tocqueville : les Tea Party Patriots représentent le renouveau de la droite américaine. Ils en appellent aux Pères fondateurs et à la Constitution, aux origines juvéniles mais déjà dépassées de leur civilisation, pour dénoncer les maux de l’étatisme et du collectivisme désormais plus menaçant que B. Obama a été élu, que la réforme de l’assurance du système de santé est passée et que les stigmates de la crise menacent toujours. Mouvement citoyen, élan de la masse : il faut que les Tea Parties rassemblent le plus grand nombre pour galvaniser la droite libertarienne.

Le mouvement tire son origine d’une déception sur le cours de l’histoire : les crises économiques successives de la fin du XXème siècle (les crises pétrolières de 1973 et 1979), puis celle qui ouvre le XXIème siècle, celles des subprimes, interrompent et grèvent durablement le formidable essor des consommateurs avide de niveau de vie médian de plus en plus grignoté par la pauvreté mal que l’ont avait relégué au XIXème siècle et qu’on tolérait pour une minorité. Tous ces déçus américains voudraient revenir à l’époque bénie où le salaire d’un ouvrier suffisait à satisfaire une famille dans un décor pavillonnaire. L’image égalitaire du standard semble de plus en plus s’éloigner. Pourtant dans les années 1950 l’avenir était radieux : la croissance avait atteint une vitesse de croisière pleine d’espoir pour les jeunes ménages et on ne parlait pas encore de décadence du monde moderne. Tout juste si on ne se posait pas de question sur les standards. General Motors et Ford avaient le monopole de l’érotisme des masses, encadrait le désir du consommateur en déterminant sa libido. C’est le moment des pin-up : une voiture et une belle femme, les symboles, simples et reconnaissables de la réussite. Paradoxalement, c’est Cuba, en révolte contre ce système qui l’a figé et qui en fait aujourd’hui une valeur touristique avec ces voitures des années 1950 qui roulent toujours et que l’on risque au détour d’une rue de trouver nonchalamment garée nous rappelant la rutilance des années 1950. Cuba était en révolte mais les Tea Parties sont en réactions… 60 ans les séparent.

VoitureLa réaction est celle des déçus. Pourvu qu’elle reste nostalgique, ceux-ci ne sont pas dangereux, ils écoutent du rockabilly, meublent leur maisons de rocking chair et chinent des juke-boxes qui ont pris à mesure que ce passé est regretté une valeur inestimable. Alors autant le nostalgique est sympathique autant le fanatique réactionnaire et dangereux. Aussi ironique cela soit-il la réaction aux Etats-Unis rêve secrètement de Cuba alors que nous vivons une époque formidable : sur un écran d’ordinateur non seulement les pin-ups sont plus belles mais elles sont plus variées il parait même qu’il y en a des animées. Si c’est ça la décadence…


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9 novembre 2010

Explication de texte.

 

                Maintenant que le ciel est plombé, qu’il pleut sans discontinuer, on peut, la tête froide, revenir avec lucidité sur nos émois de l’été : les superficiels bienfaits de la cuisine à l’huile d’olive, les sempiternels dangers de l’exposition au soleil sans protection adaptée, mais ce serait passer à côté du fait culturel révélateur, le traditionnel « tube de l’été » qui n’échappe pas à la « douche froide » de cet automne, pour emprunter l’expression de Mr. Guy Carlier et de sa fameuse chronique éponyme sur Europe 1.

Tout l’été donc, les radios ont passé en boucle un impératif d’enfant gâtée : «Je veux », petite formule convenue qui s’élève contre la toute aussi petite morale bourgeoise – du moins le prétend-elle. Dégringolent alors en cascade les interprétations fumeuses : ce serait une chanson anticonsumériste, un hymne à la décroissance, bref une poésie merveilleuse. Pourtant, dans le texte les choses apparaissent parfaitement dissonantes ; Zaz, personnage qu’on dit haut en couleur, néanmoins rehaussé des couleurs criardes de la génération bohème, veut, exige et croit pouvoir dédaigner ce qu’elle ne peut avoir. Profession de foi un peu facile !

 

Donnez-moi une suite au Ritz, je n'en veux pas ! 
Des bijoux de chez CHANEL, je n'en veux pas ! 
Donnez-moi une limousine, j'en ferais quoi ? papalapapapala 
Offrez moi du personnel, j'en ferais quoi ? 
Un manoir à Neufchatel, ce n'est pas pour moi. 
Offrez-moi la Tour Eiffel, j'en ferais quoi ? papalapapapala 

On peut certes trouver ces paroles infantiles charmantes, mais le second couplet condamne l’ingénue. Symptomatique d’une génération qui n’a pas eu le loisir de se rebeller au-delà de ce qu’on appelait encore, il y a une décennie,  « la crise d’adolescence » et qui mobilisait les rédactrices de journaux féminins, Mme Zaz est au centre du monde et refuse de se plier… à l’élémentaire politesse. Ce qu’elle prend naïvement pour un péjoratif, l’hypocrisie, est le fondement de notre cohésion sociale sans laquelle nous serions en conflit permanent. Elle prône des rapports barbares et, comble de l’infantilisme, croyant en sa toute puissance exige qu’on l’excuse.

 

J'en ai marre de vos bonnes manières, c'est trop pour moi ! 
Moi je mange avec les mains et j'suis comme ça ! 
J'parle fort et je suis franche, excusez moi ! 
Finie l'hypocrisie moi j'me casse de là ! 
J'en ai marre des langues de bois ! 
Regardez-moi, toute manière j'vous en veux pas et j'suis comme çaaaaaaa (j'suis comme çaaa) papalapapapala

                Nous serons indulgents malgré autant de candeur insolente, d’autant qu’elle n’en a strictement rien à foutre. Et, littéralement, elle n’est pas si abjecte que cela. « Excusez-moi » à l’impératif est ce qui reste dans un monde où il n’y aucun remord. Disparue, la tension entre le regret et le pardon ne nous permet plus de faire amende honorable. Le poète l’avait pourtant prédit :

 

Comme on peut en juger, je n’étais pas infirme pour me trouver des justifications de mauvaise foi. La vie devait m’enseigner qu’il ne s’agissait pas d’un comportement personnel, mais que le plus grand nombre de mes contemporains s’assurait la paix de l’esprit en se donnant l’absolution plénière pour des actes, des projets, des pensées les plus contestables, quelques dommages qu’ils aient pu causer à autrui. Au train où vont les choses, le mot « remords » n’a plus longtemps à figurer dans le vocabulaire français.

In Les confessions d’un enfant de la Chapelle d’Albert Simonin. 

 

 

 

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27 octobre 2010

Illustration - Le fossé (II)

 

Sans doute, il était difficile de comprendre le dernier sujet sans connaître l’œuvre de R. Hobb. L’illustration qui vient a pour but de démontrer, cette fois sans les circonvolutions langagières de la théorie, les allusions conceptuelles et les explicitations, où le bât blesse.

L’exemple pris à une portée universelle – encore que, l’issue de cet article soulignera les limites de cette portée – et je veux croire qu’à la différence de R. Hobb, toute personne connaît P. Picasso. Déjà, remarquons que nous avons, comme dans toute culture, érigé des références ; Picasso en est une, incontestable dans le domaine de l’art contemporain.


                Le constat est alors simple et déconcertant. La culture est presque en libre accès – physiquement – les bibliothèques municipales sont gratuites, les droits d’entrée des musées nationaux sont loin d’être prohibitifs et, malgré l’effort national, l’élan impulsé par A. Malraux, nous en éprouvons l’essoufflement.

Il est de bon ton, surtout lorsqu’on prétend appartenir à la dominante classe moyenne, d’avoir une « culture », aussi stérile soit-elle. D’où la prolifération et la diffusion de cette manne des « manuels de culture-G », sortes d’ersatz fabuleux de ce que l’on érige comme le suprême du raffinement.

Demeure alors une sorte de quiproquo : il existe une culture obligatoire, de façade, sans laquelle on ne figure pas parmi les classes émancipées c'est-à-dire aptes à pratiquer le loisir de masse, distincte de la véritable culture ferment de la création. C’est donc sur la première, la culture illusoire, que butte l’élan philanthropique de la démocratisation, trop souvent raccourcie par l’autoroute de la vulgarisation : ainsi accélérée, la culture n’a plus d’Histoire, elle persiste seulement comme caution de classe.



                La domination culturelle a encore de beaux jours devant elle, malgré les efforts généreux, les utopies portées par l’idée d’égalitarisme. L’arriviste, le nouveau riche, l’accédant aux classes supérieures ne peut toujours pas se débarrasser de ses carences culturelles. Les anecdotes sont nombreuses et probantes. Voyez plutôt : une jeune fille, visiblement avide d’en découdre avec les concours de l’administration, qui plus est au rang A, lassa entrevoir, en fermant son ordinateur, le Guernica de Picasso, placé ici en fond d’écran. 

guernica

 

 

 

 

 

 

 

Au-delà du fait qu’il soit absurde de faire de ce tableau un fond d’écran : nous conviendrons que ce n’est pas un objet de consommation, mais une œuvre et pardessus tout, un acte militant, cette peinture a un effet dévastateur pour quiconque se prend à l’examiner. La violence d’un tel charnier ne peut qu’infliger un sentiment d’effroi à celui qui la regarde. Doit-on en conclure que cette jeune fille était animée d’un masochisme affiché ? La vérité est plutôt celle-ci : elle a simplement eu la prétention de faire croire qu’elle maîtrisait les grands noms de la peinture contemporaine, sans prêter attention au contresens, flagrant qu’elle faisait. Tel un singe savant, elle se pare de signifiant qu’elle ne comprend pas.

Le ridicule ne tue pas. En revanche, il révèle un fossé que la classe moyenne n’a pas réussi à combler malgré la colossale culture de masse. 

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8 octobre 2010

Défense - La portée créatrice de R. Hobb (I)

 

  Comme tout futur best-seller, généralement étranger, souvent anglo-saxon, celui-ci ne déroge pas à la règle, le 1er tome de la nouvelle saga de Robin Hobb : Dragons et Serpents, Les cités des Anciens est annoncé par une grande campagne publicitaire.

P9200107

 

 

 

 

 

N’étant pas dans les arcanes de Pygmalion, l’éditeur, j’ai été sinon étonnée, du moins vexée d’apprendre cette parution par le commun affichage du métro de Paris


Genre littéraire populaire, gardé du populisme par la barrière de la lecture, l’heroic fantasy, la fantasy, parfois dans une version française très approximative « le fantastique », a mauvaise réputation. Robin Hobb doublement en tant qu’écrivain à succès et chef de file contemporain. Sous lecture, sous culture, il est aussi infamant de lire un magazine féminin ou un livre de développement personnel. Pourtant le sujet est un inédit de la réalité : il ne prend pas pied dans la petite expérience quotidienne, banale, médiocre et sans intérêt de son auteur. La biographie ou, plus grave, l’invention à partir du substrat expérimental témoigne de l’atrophie du surmoi et, en compensation, de l’hypertrophie écrasante du moi. L’expérience personnelle rapportée sur le ton de la confidence accable les lecteurs jusqu’à les abrutir de particularismes idiots. C’est précisément ce travers narcissique de notre époque qu’évitent les ouvrages de pure fiction.

 

                La différence de Robin Hobb ne fait donc pas l’unanimité, son imagination est même, le plus souvent, méprisée. Dans une société où on pense l’individu comme un être rationnel, conforté par le prisme de l’Homo Economicus, un discours qui se détache du réel, ou plutôt de l’expérience individuelle telle qu’elle est vécue – il faut comprendre, « dans le sentimentalisme » - mène à une incompréhension hostile qui se traduit par le rejet manichéen de la spiritualité. En effet, dès lors que, selon le schéma admis, nous opposons, caricaturalement, le rationnel au spirituel, nous n’acceptons plus la pure création, qui ne prend appui que sur l’imagination : le potentiel artistique en tant qu’abstraction n’existe pas. Ce nihilisme nait donc de l’erreur originelle qui consiste à trouver le monde rationnel lorsqu’il est à la portée de la plus triviale des expériences.

 

Est-ce l’absence de religion qui conduit à un tel déni des choses de l’esprit ? Au rejet radical de l’expérience spirituelle ? R. Hobb ne semble pas placer le débat dans l’opposition simpliste du sacré et du rationnel. En revanche, toujours selon elle, il existe une spiritualité d’élection dans une dimension rationnelle, puisque plus cruelle que clémente : le merveilleux, étonnant extraordinaire, est exclu des Six Duchés, de Terrilville et du Désert des Pluies. On l’appelle l’ « Art », certainement une mise en abyme terrible, où les êtres, dont l’âme est façonnée par l’ascendance noble, peuvent entrer en communication de manière subtile et inaccessible pour le commun des mortels. Sans doute R. Hobb a-t-elle mis en exergue cette dimension, métaphore sociologique de la culture en tant qu’objet de pouvoir dont la transmission ne peut être faite que sur critère d’élection, dans un manifeste dissimulé : Retour au Pays opuscule que l’on aurait tort de négliger. Les dons artistiques sont décrits comme la clef de voute de la civilisation. Le corps social est tel que ce sont les personnes qui ont le courage de cultiver l’esthétique qui possèdent le pouvo ir et la raison. Cette dernière assure, par son pragmatisme et la morale solidaire la survie de tous.

Alors peut-être le rejet est-il d’autant plus implacable qu’il est provoqué par le raidissement de l’opinion autour de l’idée rassurante mais stérile et fausse de l’égalitarisme. Dans un monde où tout est vain, même (surtout !) la distinction, que faire sinon nous regarder le nombril et parler de soi. Le roman n’existe plus alors comment envisager, avec apaisement, la fiction, et même le vaste domaine de la création qui ne procède que de l’oubli de soi pour la naissance de l’art (l’ « Art » ?!?)

A suivre… 

 

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14 septembre 2010

L’impuissance du détracteur de Facebook

Il y a 2-3 ans nous pouvions encore, même minoritaires, refuser d’y participer, décliner l’invitation ou encore ignorer Facebook. Lorsque la première vague est passée, à mesure des cooptations, le phénomène de mode attirait les curieux et l’idée de se représenter sur la toile ne déplaisait pas ; même, cette mise en scène des liens sociaux permettait de les consolider (voire de les « officialiser » aux yeux de tous) ce qui est extrêmement rassurant pour des égos craintifs, hantés par le reflet solitaire que leur propose le miroir de leur ordinateur. Les esprits faibles ont donc été les plus rapidement séduits et les remises en question de leur nouvelle conversion n’ont été qu’isolées, le plus souvent à la suite de déconvenues concernant la divulgation de leur vie privée. Cependant, « le phénomène Facebook », comme il est convenu, dans la presse, de le désigner, ne se résume plus à l’addition arithmétique de chacun de ces expériences individuelles : le détracteur de la tentacule doit mieux mesurer son adversaire.

L’idée originale de Facebook n’est pas celle du réseau social, ni même de sa représentation virtuelle, les sociologues utilisaient déjà ce genre d’outils pour modéliser les rapports sociaux et en dégager les pratiques, mais c’est l’adhésion et l’investissement personnel des sondés qui sont à la fois surprenants et novateurs. Par eux-mêmes les individus revendiquent des informations privées sous leur propre identité, ainsi ils délivrent, de leur plein gré, aux sociologues – aux enquêteurs marketing, qu’importe – leurs liens sociaux, affectifs, sentimentaux, idéologiques, leurs goûts en matière de loisirs et plus largement de consommation. Une masse d’informations sans précédente pour les observateurs, cependant imparfaite. L’échantillon ne tient pas compte de tous ceux qui ont refusé d’y participer. L’enquête sociale globale est donc partielle.
Or désormais, Facebook est si bien intégré dans les pratiques sociales que, selon un consensus qui atteste de son omniprésence, ne pas y adhérer ce n’est pas y être indifférent (à la manière des sondages : « vous êtes pour, contre ou indifférent ? »), mais se prononcer contre. Nous ne pouvons ignorez ce qui est devenu une norme sociale et bien naïf celui qui croit que ne pas la pratiquer c’est adopter une attitude neutre ; l’ubiquité de Facebook est telle qu’être en dehors est devenu une façon différente d’être dedans. Personne ne peut éviter Facebook, l’enquête sociale globale est bouclée et celui qui n’y figure pas, s’y refuse pour des raisons qui le dépassent et que Facebook a trouvées pour lui. Il est un SOCIOPATHE doublé d’un REACTIONNAIRE ne jurant que sur l’authenticité d’un échange dans le monde réel. ANTI-SOCIAL !

 antisocial

Le retour de TRUST pas si hors sujet que ça…

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6 septembre 2010

Les fiches de l’Education nationale

« Vous me remplirez une fiche avec : votre nom en caractères majuscules, prénom, date de naissance, adresse, numéro de téléphone des parents… »

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A partir d’aujourd’hui, et pendant une semaine, chaque professeur procèdera de même : c’est le rituel de la rentrée, demander leur état civil aux élèves afin de les connaître. Plutôt complaisant à cet atermoiement de la véritable étude, ces derniers se soumettent à l’exercice. Le nouveau pédagogue se révèle aussi dans ses maniaqueries : certains suggèrent que la fiche soit une demi-feuille tournée dans le sens du portrait, d’autres contribuent à ce fichage en distribuant des fiches de bristol parfois même de couleur différente selon les années (mais toujours payées avec leurs propres deniers). Jusque-là, les élèves, la tête rentrée dans les épaules, s’appliquant à retrouver la souplesse de leur poignet pour écrire de manière la plus lisible possible, ne se posent pas de question, ils remplissent machinalement : on change rarement de nom, de prénom et encore moins de date de naissance, quant à l’adresse, sauf pour les fils et filles de militaires ou de diplomates, elle reste plus ou moins la même. Les choses se corsent lorsqu’au gré de son inspiration perverse le professeur pose d’autres questions, cette fois plus personnelles :

 

« …vous me préciserez ensuite la profession du père et de la mère, s’ils sont divorcés, séparés, le nombre de frères et sœurs, leur âge et leur niveau d’étude, enfin vous me direz quels sont vos loisirs (question subsidiaire très embarrassante pour l’élève qui n’a pas du tout envie de parler de lui) ».

Bien que ces questions soient posées sur le même ton, avec le même naturel blasé/décontracté puisque le professeur utilise invariablement le même protocole d’une année sur l’autre, elles ne sont pas moins ambigües pour l’élève qui doit parler de la vie privée de ses parents. Lorsqu’on franchit les portes de l’école/ collège/ lycée, tous affublé du même sac, accablé par les mêmes exigences, on peine à croire que les discriminations soient fondées sur la vie privée. Ce n’est pas un hasard si les déclarations d’impôts arrivent chez le contribuable emballées dans un bleu nuit opaque protégeant leur confidentialité. L’extorsion sournoise d’informations à des enfants ou des adolescents, qui ne sont pas en mesure de les refuser, constitue un abus de faiblesse et une atteinte à la vie privée. La lâcheté de ces professeurs, quelque fois des écoles, d’autres des collèges et des lycées est d’autant plus malsaine qu’ils n’ont pas besoin de ces renseignements pour enseigner. Dans le creuset de l’éducation nationale, le statut socio-professionnel, la situation matrimoniale des parents n’est pas un indicateur, à moins que les professeurs, eux-mêmes, bien que pourfendeurs des inégalités sociales, regrettant l’ascenseur social, par dépit ou par bêtise, se jettent dans l’engrenage du déterminisme et de la reproduction sociale.

Nul ne sait ce qui se passe dans la tête de ces assistants sociaux sans objet, et nous-mêmes nous ne savons pas ce que deviennent les fiches qui alimentent, année après année, la banque de données de ces hommes et femmes mandatés par l’Etat.

 

En URSS, les parents ne se plaignaient pas du régime soviétique devant leurs enfants de peur que ceux-ci les dénoncent à l’école. Aujourd’hui, en France, si les professeurs n’ont pas de mobile politique (ce qui est, par ailleurs, tout à fait envisageable), n’ont-ils qu’une curiosité malsaine, ou simplement une vocation de statisticiens refoulée?  

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29 août 2010

Do it Yourself !

6231328_2Le féminisme, le MLF étaient passés par là : elles refusaient de faire à manger, de se mettre dans cette position nourricière séculaire ; qu’à cela ne tienne, les hommes ont inventé le micro-onde, les surgelés ; grâce à eux ils ne sont pas morts de faim. Ils ont bravement résisté à la disette culinaire où les rares cuisinières qui faisaient de la résistance étaient les plus vieilles qui n’avaient pas compris la révolution des mœurs, c’était l’époque où l’émission Bon appétit bien sûr régnait sur le royaume du ringard. Maïté avait, comme encore aujourd’hui, une fonction comique avec son accent, son physique dodu et ses recettes sorties d’un temps que nous croyions ancien. Bien sûr, il y avait aussi les résistantes, les rétrogrades qui gardaient précieusement, dans un coin de leur cuisine, tâchées de gras les recettes détachables de Elle, ce journal scandaleusement traitre au genre. Pour appliquer une de ces recettes c’était le parcours du combattant : il fallait se cacher dans des cuisines conçues pour réchauffer des pizzas, trouver les ustensiles adéquats. Et puis, de toute façon, personne n’aimait plus ça.

Les experts étaient alors formels : c’était une tendance lourde qui ne fera que s’accélérer dans la société, bientôt les plus récalcitrantes au féminisme finiraient par succomber à l’appel du loisir hors de leur maudite cuisine. L’attribut de la femme n’étant plus le rouleau à pâtisserie, sa meilleure arme avec la spatule, il fallait désormais qu’elles se défendent sur les mêmes plates bandes des hommes alors munis de leur micro-onde et du salvateur décapsuleur à bière. On dit que la révolution de 1968 a fait des ravages de décadence : les femmes n’allaient plus chez le coiffeur, elles ne nourrissaient plus leur famille. Et pourtant ce qui était destiné à être une libération a échoué. A cause d’un confus regret dicté par les instincts féminins, la révolution a encore fait un tour complet et s’est mordue la queue, à l’aube du XXIème siècle l’engouement pour la cuisine est devenu à la mode : les plus touchées ? Les jeunes femmes nouvellement en ménage qui ne veulent pas répéter les erreurs de leurs mères quitte à endosser l’asservissement de leur grand-mère. Heureusement pour elles, le marketing rassure et draine des milliers d’autodidactes ayant hâte d’en découdre avec leurs nouveaux ustensiles : moules siliconés, plaques à induction et surtout le « plan de travail » qu’on croyait définitivement éradiqué du mobilier de cuisine. C’est chic, c’est design : pour elles, rien à voir avec un retour en arrière.

Cela aurait pu durer encore quelques décennies, on aurait continué à manger des plats surgelés, à raviver le souvenir si poétique du mijoté dans des restaurants français. Et c’est donc la « crise » (comme s’il y en avait eu qu’une) qui précipite la fin de la révolution, le retour, aboutissement (logique ?!) du tour complet. Les femmes armées de leur réflexes ataviques font de la résistance épaulées par les mass-médias: les rayons des librairies remplis de livres de cuisine aux couleurs acidulées, des émissions de télé : Un diner presque parfait, Top chefs…, des blogs et des sites de recettes de cuisine. Tout pour faire des verrines, des macarons et des cakes. Tout pour régaler la famille d’une cuisine actuelle rafraichissante et tellement salvatrice ; sans elle nous ne pourrions répondre à la question aussi lancinante qu’angoissante : comment occuper nos vacances et RTT ?  Pour nous combler, cuisine jeune, cuisine tendance : Mesdames, mesdemoiselles, retournez à vos fourneaux… enfin !

Avec un tel retournement, on ne peut pas s’empêcher de penser (si si, je vous promets c’est irrépressible !) que, plutôt que de faire la révolution pour se libérer de leur condition, les femmes auraient du changer de convictions ; ne plus tout sacrifier, sur un coup de tête, à la mode alors que celle-ci est aussi changeante qu’impitoyable. Il est désagréable de constater que l’asservissement aux tendances peut-être plus fort et plus profond que nos dilemmes culinaires ; sûrement parce qu’il est inconscient. Les femmes sont des girouettes ? Non, c’est la mode qui change, les femmes suivent immanquablement.

 

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